Alors que notre niveau de vie s’améliore constamment depuis deux siècles,
l’univers des risques connaît une expansion fulgurante dans notre société,
dont le modèle économique est pourtant pérenne. Comment le monde de l’assurance
se positionne-t-il face à cet enjeu ? Ce manuel offre de précieuses connaissances
et démonstrations aux professionnels du secteur, aux étudiants ou à quiconque
s’intéresse au monde de l’assurance. Il montre comment les entreprises de gestion
des risques inscrivent leur stratégie de développement dans la double
perspective de protection du consommateur et de sauvegarde de la
stabilité finan-cière des marchés. Les auteurs proposent une approche
pédagogique et donnent les clés pour appréhender la gestion des
risques, les réglementations ainsi que les outils mathématiques,
techniques et juridiques indispensables aux métiers de l’assurance.
(puf)
L’assurance est née de l’éternelle quête des sociétés pour se prémunir contre les événements dommageables dont la survenance est aléatoire. Il s’agit fondamentalement d’une opération de mutualisation, par laquelle les agents économiques – personnes physiques et entreprises – payent une prime en contrepartie d’une indemnisation financière en cas de survenance d’un certain nombre de risques. La prime dont l’assuré s’acquitte est calculée de telle manière qu’elle permette à l’assureur d’honorer le contrat et de tenir l’ensemble de ses engagements. Elle est donc fonction du risque couvert : plus la probabilité de survenance du dommage est forte et/ou plus le potentiel de gravité du dommage est important, plus la prime est élevée. L’assurance fonctionne essentiellement selon un mécanisme dit de répartition : les primes payées par les assurés qui n’ont pas de sinistre financent l’indemnisation des sinistrés. La raison pour laquelle cette « mécanique » assurantielle fonctionne s’énonce simplement : tous les assurés ne subissent pas un sinistre en même temps. C’est en ce sens que doit être comprise la devise multiséculaire des Lloyd’s – créés à Londres en 1688 – qui définit très justement l’assurance comme « the contribution of the many to the misfortune of the few » (en français : « la contribution du plus grand nombre au malheur de quelques-uns »). Ce principe de mutualisation, qui constitue le fondement même de l’activité d’assurance, s’appuie sur des bases scientifiques, et notamment la théorie des probabilités. Les principes mathématiques sous-jacents sont connus sous les noms de loi des grands nombres et de théorème central limite. Intuitivement, ils énoncent que lorsque l’on combine un grand nombre de risques qui, dans une large mesure, sont indépendants les uns des autres, il se produit un effet de compensation entre ces différents risques – dit autrement, entre les assurés qui ont un sinistre et les assurés qui n’en ont pas – et la sinistralité agrégée sur l’ensemble du portefeuille de risques devient relativement « prévisible ». Le travail de l’assureur et encore plus du réassureur consiste donc essentiellement à modéliser les risques, à les sélectionner, puis à les mutualiser en constituant des « portefeuilles » de risques diversifiés – tout en veillant à se prémunir des cumuls de sinistralité, une considération de plus en plus prégnante alors que les risques sont de plus en plus sériels, globaux, et que les interconnexions entre les différents risques croissent.Le premier constat qui a motivé l’écriture de ce manuel est que ces grands principes économiques de l’assurance sont rarement décrits et encore plus rarement enseignés. Alors qu’un très grand nombre d’ouvrages traitent, à titre d’exemples, de la théorie de la création monétaire, de la modélisation du risque de crédit ou encore des méthodes de couverture des produits dérivés en finance, il n’y en a quasiment aucun – tout particulièrement en dehors du monde anglo-saxon – qui se penche sur les fondements théoriques de la (ré)assurance : la mutualisation des risques, leur segmentation, leur sélection, les problèmes d’antisélection et d’aléa moral, la limitation des garanties, le calcul des provisions, l’optimisation de la gestion des fonds propres des (ré)assureurs, le recours efficace à des mécanismes de transfert de risques à des tiers, etc.L’assurance est née non seulement de la théorie des probabilités mais aussi du droit, tant de l’organisation du contrat que des risques eux-mêmes. C’est en effet le droit de chaque pays qui définit et caractérise la responsabilité civile, l’indemnisation des dommages corporels, les risques de la construction, la fiscalité de l’épargne, l’organisation du système de santé public, le fonctionnement des régimes de retraite avec divers degrés d’étatisation… Cette diversité d’approches face aux risques entre les différents pays explique la fragmentation des marchés nationaux de l’assurance, qui ont chacun des spécificités et caractéristiques propres. Cependant, à la différence du droit du contrat d’assurance et du droit des risques qui présentent une dimension largement « nationale » ou régionale, les grands principes mathématiques et économiques de l’assurance qui sous-tendent la couverture et l’agrégation des risques sont universels.Ce manuel a pour objet de décrire ces grands principes fondateurs et directeurs. Il a, par sa nature de texte généraliste, le mérite d’ouvrir les débats sur le risque et les techniques de sa couverture, qui sont de deux ordres. Définir les risques majeurs et leur assurabilité d’une part, et définir les voies et moyens qui sont les mieux adaptés à la protection des citoyens contre ces risques d’autre part : la mutualisation générale ou la mutualisation réduite à des segments de marché, l’individualisation des termes et conditions de couverture des risques ou la péréquation entre assurés à travers l’égalisation de ces termes et conditions, la solidarité nationale ou les garanties émises par le marché, la couverture des risques par la (ré)assurance ou par les marchés financiers, etc.Enfin, ce livre répond à un besoin ancien des métiers de l’assurance, à savoir la nécessaire transmission des savoirs. La littérature assurantielle est trop souvent cantonnée à des ouvrages et articles dont l’objet est restreint et la technicité, très pointue. Il fallait pallier ce manque de visibilité générale sur les fondamentaux du métier et donner aux étudiants un instrument de formation efficace. Tant les progrès rapides de la gestion des entreprises que les attentes des nouveaux arrivants sur le marché du travail font que le modèle d’apprentissage « sur le tas », qui a longtemps été celui de l’assurance, n’est plus recevable. Les métiers exigent des compétences accrues, une capacité de mobilité professionnelle et naturellement une habilité digitale que la formation initiale doit satisfaire si l’industrie de la (ré)assurance veut recruter les talents qui lui sont nécessaires. C’est à cela que ce manuel entend contribuer. Ainsi les auteurs font faire un important pas en avant à la diffusion de la théorie générale de l’assurance et à la capacité de l’enseigner à un nombre croissant d’étudiants que « les métiers du risque » intéressent.
Ce manuel est un ouvrage de référence, indispensable pour tous ceux souhaitant maîtriser les mécanismes fondamentaux de l’assurance. Il leur explique les concepts et leur fournit les outils pour développer leurs connaissances sur la couverture et le transfert des risques lato sensu et pour comprendre les défis théoriques comme pratiques que leur mise en œuvre soulève.